« Parcours prodigieux d’une souveraine méconnue » ou l’histoire dans un roman

Lire nous transporte dans des lieux et des temps très variés. Les auteurs nous font entrer dans l’univers de leurs personnages avec plus ou moins d’adresse, mais chacun d’eux possède sa manière de rendre unique ses textes, de les colorer telle une peinture de notre artiste national Maher Kamoun.
En occupant les premiers postes tels que les entreprises publiques, de L’ENA ou encore de l’Imprimerie Officielle de la République, Maher Kamoun n’a sans doute pas eu le temps de s’éclater dans ses passions artistiques telles que la peinture ou la littérature enfouies au plus profond de lui-même. Aujourdh’ui sa retraite est une révélation de ses multiples dons dans le domaine et dont le processus le mène déjà à son dernier cru littéraire du « Parcours prodigieux d’une souveraine méconnue », titre de son livre à succès qui vient d’être publié juste après «Habib Bourguiba 1903- 2000 Ombres et Lumières».

De l’ombre à la lumière également d’une véritable histoire d’une ancienne odalisque d’origine circassienne, offerte par le Sultan Ottoman au Bey de Tunis, au XIXème siècle. « Placée à l’âge de quatorze ans au harem beylical, la jeune fille est contrainte durant vingt cinq ans, de se soumettre à la volonté souveraine des deux Beys régnants qu’elle épouse contre son gré, Sidi Mohamed El Sadok Bey et son frère Sidi Ali III Bey.
Intelligente et grande manœuvrière, Lella Qmar a su forcer le destin. Elle épouse Sidi El Naceur Bey et connait avec lui le bonheur de l’épouse et la puissance de la souveraine. Veuve pour la troisième fois, Lella Qmar vit au « Qsar Saada » à la Marsa, que son défunt époux lui offre à la fin de son règne et continue à se battre pour garder son influence au sein de la cour beylicale.
Elle s’éteint en décembre 1942, sous le règne tumultueux de son bien aimé beau fils, Sidi El Moncef Bey et a la chance de ne pas vivre le douloureux épisode de son abdication. Le monde de Lella Qmar s’effondre après sa mort et la dynastie husseinite vieille de deux siècles et demi s’écroule. »

L’ouvrage de Maher Kamoun est d’une recherche, d’une ampleur narrative et descriptive exclusive.La construction et les différentes techniques d’écriture utilisées changent au fur et à mesure qu’on avance dans la lecture. C’est comme si Maher Kamoun réinvente agréablement le roman, par les changements de style.
Il s’affranchit des barrières du langage en déplaçant la narration des événements à la narration elle-même et aux pensées intérieures des personnages. On y suit les pensées telles qu’elles apparaissent et se transforment. C’est que ce roman met en scène, les rapports de tel ou tel individu à une histoire où la mobilité sociale, les antagonismes de classes, de peuples, de religions créent, en abaissant ou en éliminant les uns, en portant au pouvoir les autres, des situations admirablement dramatiques.
Combinant une composition par tableaux avec des passages narratifs rapides, il met en scène le plus souvent des épisodes marquants de l’histoire tunisienne, comme si l’évolution et la volonté de l’auteur est de rendre le ton de l’histoire plus sombre, plus étrange pour en faire ressortir les émotions. La fluidité et les rebondissements étant parfaitement dosés, le suspens demeure, un suspens qui donne au lecteur cette sensation de surprise bienvenue.

Des personnages attachants, une histoire mêlant drame, amour et espoir. Des personnages qu’on ne veut presque pas quitter et qu’il est difficile de laisser à la fin du livre.
Un livre « vivant » qui arrive à déclencher à travers sa lecture, une palette de sensations, une sorte d’empathie avec les héros comme si on pouvait nous-même vivre l’histoire. Un livre « sensations-nel » qui nous laisse admiratif pour le talent de l’auteur. Un roman historique fort efficace, qui nous ravie et si vous n’avez pas encore entamé cette saga, n’hésitez plus elle vaut vraiment le détour.

En attendant une plus large distribution, Vous pouvez déjà trouver l’ouvrage dans les bonnes librairies telles que El Moez (Menzah I) et Mille feuilles (La Marsa.)

Nadia Ayadi

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