Vie de couple Mon mariage bat de l’aile
De nos jours, se séparer est devenu normal en Tunisie, banal même. Au début de l’union, tout se passe sans accrocs, mais la vie quotidienne et les petites contrariétés qui en découlent vont détériorer la relation du couple. Aucune relation au monde n’est parfaite et aucune union ne peut donner à chacun le sentiment de complémentarité qu’il souhaite. La colère, les cris, les pleurs, les insultes, les menaces ou la main qui frappe ne laissent plus la possibilité de se raccommoder. Pour bon nombre de maris et d’épouses, le dilemme se résume alors en deux mots : partir ou rester.
Enquête sur ces couples qui battent de l’aile, sur un vase clos où tous les coups sont permis…
Chômage, maladie, deuils, problèmes matériels, soucis concernant l’éducation des enfants : l’équilibre et la solidité d’un couple se mesurent à sa capacité à traverser les épreuves, à faire front ensemble face à l’adversité…. Autant d’épreuves qui peuvent altérer une relation ou la renforcer, selon l’attitude des deux partenaires.
Des questions essentielles
Un sociologue pose des questions fondamentales : « il faut faire le point sur la qualité et la viabilité d’un couple et réfléchir à des sujets précis. Est-ce que l’on aime passer du temps ensemble ? Partage-t-on la même conception de la vie de couple ? Est-on libre de choisir ses amis ? Se fait-on confiance mutuellement ? Répondre à ces questions permet de faire le point sur la relation au sein du couple et d’évaluer sa viabilité à long terme. Ce bilan va permettre aux deux partenaires de prendre une décision dans la sérénité. »
Mais un tel exercice exige une discussion dans le calme et un regard objectif. Certes, ce n’est pas facile, car les deux partenaires sont trop impliqués sur le plan émotionnel, mais il faut s’accorder le temps de la réflexion, de l’analyse avant de prendre sa décision. Le grand drame des couples tunisiens, c’est de se résigner et de se séparer avant d’avoir mis à plat tous les problèmes.
Pour un psychologue « le couple que l’on forme est notre reflet et sa réussite ou son échec n’est jamais la faute de l’autre seulement. Les désaccords sont inévitables dans un couple et certains estiment qu’ils sont nécessaires, car ils sont l’expression d’une relation ouverte, qui évolue et dans laquelle chacun exprime sa différence. Ces conflits peuvent avoir des aspects positifs et permettre d’évoluer en faisant des choix qui peuvent déboucher sur des solutions négociées. »
Mais, l’un des plus grands problèmes du couple tunisien est l’excès d’autorité du mari que nombre d’épouses ont tenu à dénoncer, comme Ghada, 32 ans : « j’ai l’impression de vivre sous contrôle, en plus des critiques répétées et des vexations quoi que je fasse ou dise…Je n’ai pas le droit d’avoir des amies et encore moins de parler avec des collègues hommes au travail. Tout cela mène à des conflits à répétition car aucun de nous ne veux céder. Résultat : on n’arrête pas de se chamailler pour des prétextes futiles… »
Les valeurs morales, culturelles et depuis quelques années, les idées politiques, déterminent la façon dont on appréhende le monde, mais aussi notre manière de nous comporter et de faire des choix. Si les idées des partenaires sont radicalement opposées, il y a fort à parier que les malentendus et les conflits seront fréquents. Il ne s’agit pas d’être d’accord sur tout, mais d’avoir le sentiment de partager globalement la même vision des choses.
La confiance, clé d’une union réussie
Cela fait dire à notre psychologue : « le lien du couple c’est le plaisir de partager des idées, des émotions, des sensations fortes, des découvertes. Lorsque ces éléments disparaissent, le couple risque d’entrer dans une phase de perturbations qui peut mener à la séparation. Il faut aussi se poser les questions fondamentales : quels sont les reproches que l’on se fait souvent ? Quelles sont les étincelles qui déclenchent les scènes de ménages ? Quelles sont les critiques les plus fréquentes que l’on s’adresse mutuellement ? »
La confiance est l’élément clé d’une union réussie, tout comme la bienveillance est la base du couple… Lorsque la vie à deux tourne à l’orage ou au calme trop plat, certains s’empressent de quitter le bateau. Or, une relation durable et équilibrée est celle où on s’investit à égalité. La distribution des rôles est alors essentielle.
Une dame d’âge mûr nous a affirmé : « le fondement d’une relation affective saine et respectueuse réside dans la liberté d’être soi sans avoir peur d’être jugé ou rejeté. La peur de l’autre, de ses réactions, de son regard, sont des poisons violents qui ne devraient jamais être présents dans un couple. La complicité et l’entente amoureuse reposent sur un contrat tacite que l’on pourrait résumer en une formule simple : j’aime qui tu es et je ne cherche ni à te contrôler, ni à te changer malgré toi. »
Dans une relation de couple idéale, chacun doit œuvrer à la réussite de cette union sacrée à sa façon. L’essentiel est que chacun ait le sentiment que l’autre fait tout ce qu’il peut pour que la relation soit la plus agréable et la plus solide possible. Il est vain de vouloir sauver son couple contre le désir de l’autre et d’être le seul à porter cette relation à bout de bras.
Mais parfois la charge devient trop lourde, comme cette jeune maman de 30 ans : « j’ai le sentiment que mon mari s’investit peu, presque indifférent à mes efforts, alors que c’est moi qui fait tout : ménage, cuisine, vaisselle, lessive, rangement, devoirs des enfants… Même les factures d’eau et d’électricité, c’est moi qui vais faire la queue pour les payer dans les délais. Je fais tout cela pour le libérer de ces tâches ingrates et en retour, il va directement au café avec ses copains, me laissant seule durant de longues soirées… »
Fatigue, stress, surmenage : de nombreuses situations font que les disputes éclatent pour des motifs futiles : une attitude, un geste, un regard, un mot et on explose. Ce que de nombreux psychologues ont constaté, c’est que souvent, après une dispute violente, les deux partenaires sombrent dans une angoisse profonde et ils en arrivent à se dire « j’ai l’impression d’être au bord de la rupture », ou bien « c’est la fin ».
On dit souvent que les disputes sont normales dans un couple car on s’investit beaucoup, on partage ses secrets les plus intimes, on se donne corps et âme. Résultat : la moindre contrariété remet en cause la confiance. Les disputes ne sont pas un signe de bonne santé du couple et leur répétition va semer la discorde, au point de considérer l’autre comme un ennemi. Souvent, ces disputes partent d’un petit reproche, pour aboutir à une cascade de critiques. L’accumulation des contrariétés et la répétition de ces petits reproches entraînent une accumulation jusqu’à l’explosion finale.
Selon notre psychologue « le problème peut être une insatisfaction, voire une frustration sexuelle. Les disputes sont alors indirectes, résultant de choses non dites, inavouables. Dire les choses c’est mieux que ne pas les dire et le plus tôt possible, au lieu d’attendre leur accumulation, car certaines disputes deviennent très vite blessantes. La violence, sous toutes ses formes, qu’elle soit verbale, psychologique ou physique, tue le couple à plus ou moins long terme et il y a certains mots et gestes que l’on n’oublie jamais. »
Vivre en couple et ne pas se disputer, c’est possible. Même si les querelles sont inévitables, on doit apprendre à discuter sans se blesser, sans être violent. Il faut désamorcer les conflits avant qu’ils ne s’enveniment. On peut dire à son partenaire « je ne veux pas me disputer avec toi » et aller à la cuisine ou dans la salle de bain, afin de laisser la tension baisser et le désaccord se désamorcer. Remarquez que l’on se dispute moins pendant les vacances, car on est loin des soucis de la vie quotidienne.
Alors partez en vacances dès que votre couple bat de l’aile…
Yasser Maârouf
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