Guillaume Rambourg : Voilà pourquoi la Fondation Rambourg quitte la Tunisie

Après plus de dix ans de  bons et loyaux  services quant à l’art,  l’éducation, le sport et   la culture, la Fondation Rambourg prend la décision à la surprise générale, de mettre un terme à ses activités en Tunisie. Guillaume Rambourg explique le pourquoi de cette décision, sachant que cette Fondation était au chevet de certaines entreprises tunisiennes en difficultés.

« Vous êtes nombreux à m’avoir posé la question et je souhaite clairement expliquer les raisons de cette décision mûrie lors des 12 derniers mois, afin d’éviter confusions, déformations, inventions et autres théories du complot…

La création de la Fondation Rambourg à Londres en 2011, est intimement liée à la Tunisie, puisque c’est au lendemain des événements de 14 janvier qu’Olfa et moi décidons de créer une entité à vocation caritative, alors que nous observons avec joie et incertitudes, le déroulement des événements, de l’autre bout de la planète, en vacances en Australie !

Financée exclusivement par mes fonds propres, la Fondation commence son engagement en Tunisie par la création et le financement d’un tout nouveau bureau de Human Rights Watch à Tunis. Je salue ici l’excellente contribution d’Amna Guellali, en charge du bureau pendant les premières années. Un mot de bienvenue aussi à Sabsabil Chellali, qui reprend le flambeau; elle a du pain sur la planche !

Après quelques années, nous estimons que le temps est venu de structurer les multiples actions de la Fondation en Tunisie en y créant une succursale-association (le statut de Fondation n’existant pas).

Ces actions vont être coordonnées par Karim Terras.  Le premier projet majeur porté à cette période est « L’Eveil d’une Nation », exposition au palais Ksar Saïd, rendue possible par la restauration par la Fondation de nombreux objets et toiles du patrimoine tunisien, de la très riche époque des Beys de 1830 à 1880. Merci à  Ridha Moumni.

La deuxième réalisation majeure est la création/construction du Centre culturel et des métiers de la montagne à Jbel Semmama, au cœur d’une région défavorisé et délaissée du pays et où la jeunesse n’a guère le choix qu’entre chômage, délinquance et extrémisme religieux.

Bien d’autres réalisations vont être entreprises sous la houlette de Shiran Ben Abderrazak.   Difficile d’être exhaustif, mais je retiens le sponsoring de nombreux événements culturels et festivals, les rénovations d’écoles, le financement du film « Baba Hedi » de Claire Liza Belhassine, la mise en place du CORE creative hub, qui héberge des start-ups locales, ou encore la création du Prix pour l’Art contemporain (3 éditions, rendues possibles par la passion et le travail acharné d’Elizabeth Krief Manardo.

Sur le volet sportif cher à mon cœur, la Fondation devient sponsor de la Fédération tunisienne de tennis, qui va connaître un superbe essor sous l’impulsion de Salma Mouelhi.

La Fondation contribue à l’organisation d’exhibitions au TCT (dont une, avec mon héros Yannick Noah en 2018) et finance intégralement le programme de sports-études du jeune  Alaa Trifi  à la Mouratoglou Tennis Academy.

L’été dernier, la Fondation accorde un coup de pouce financier au grandissime champion Oussama Mellouli, alors qu’il se préparait pour ses 6e à Olympiades, sous un triste nuage de démêlés juridiques au timing pour le moins malheureux.

Le dernier projet majeur, mené sur plus de 3 ans en étroite collaboration avec notre partenaire l’ONAT, concerne la cartographie digitale de tous les métiers de l’artisanat à travers tous les gouvernorats.

Le résultat final est un travail prodigieux dont nous sommes extrêmement fiers et dont bien des pays peuvent être jaloux. La culmination est l’exposition « La Main Tunisienne ».  Un livre édité chez Skira arrivera au printemps pour permettre de garder une trace de cette expérience.

Alors pourquoi arrêter en si bon chemin, me demande-t-on? Le manque d’accompagnement de l’Etat tunisien ou d’autres organismes ? On n’a jamais compté dessus. Le manque de reconnaissance ? Non, ce n’est pas pour cela que l’on s’engage dans le caritatif.

Des déceptions ? Assurément, suite à « L’Eveil d’une Nation », quand le gouvernement tunisien n’a validé ni le projet de voir l’exposition voyager au Musée du Louvre, ni celui de transformer Ksar Saïd en musée. Sans parler du fait que la Fondation n’a été ni invitée ni mentionnée par les autorités lors de son « inauguration » ponctuelle en 2019,  ce sont les aléas et les bassesses du politique…

Les raisons sont autres. Olfa se consacre dorénavant à d’autres occupations et n’est plus partie prenante de la Fondation. Pour ma part, je suis moins souvent en Tunisie. Mais encore plus important, c’est la fin d’un cycle tout simplement et nous espérons avoir inspiré de nouveaux mécènes tunisiens à prendre le relais.

La Fondation a accompli beaucoup de réalisations, pavé la voie de la philanthropie en Tunisie et va dorénavant prendre un autre chemin et se développer ailleurs, autrement.

Mon amour pour la Tunisie reste intact même si y avoir vécu et travaillé m’a fait découvrir bien des choses qui échappent au simple vacancier que j’étais avant. J’y ai des amis très chers et j’ai toujours encouragé mes enfants à revendiquer haut et fort leur tunisianité. J’y ai également des investissements et la plupart d’entre eux ont été source de plaisir entrepreneurial.

Ce n’est qu’un aurevoir. À très bientôt, et meilleurs vœux à la Tunisie pour 2022 et au-delà !

 

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