La « gladiatrice tunisienne de la massothérapie » en Suisse

 

Elle s’appelle Hella Bouaziz, elle est la première tunisienne et arabe à prendre part au championnat international de massage à Fribourg en Suisse en  2023, à y décrocher le deuxième titre parmi 146 candidats professionnels et thérapeutes de 27 pays dans six catégories (Suisse, Suède, France, Italie, Danemark, Cameroun, Inde, Allemagne, Tchécoslovaquie, Thaïlande, Japon, Lituanie, Prague, Royaume Uni, Géorgie, Arménie, Moldavie, Paraguay etc).

Elle a inscrit par ce titre le nom de la Tunisie dans les annales du World Massage Council (WMC) et de l’Académie internationale de massage de la Suisse : IMAS, l’une des écoles de formation de massage les plus réputées au monde. Une académie leader où elle a été choisie en 2022 en tant que membre par son fondateur, l’égyptien de nationalité suisse Marey El Hamouly. Un spécialiste de renommée dans le domaine du massage thérapeutique holistique, directeur du WMC, membre entre autres de la Fédération mondiale de Médecine alternative et de réadaptation sportive et de l’Académie olympique pour les dirigeants sportifs. En effet, « la Tunisienne Hella Bouaziz a fait preuve de beaucoup de sérieux, de dévouement et s’est remarquablement distinguée aussi bien dans les formations qu’elle a faites que pendant la compétition pour sa technicité impressionnante et son niveau prometteur », témoigne-t-il.

Ainsi, elle devient la première femme arabe à intégrer l’IMAS pour l’originalité de l’approche haptique-holistique qui repose sur trois procédés à savoir le flux nerveux autour de la circulation sanguine, le flux lymphatique autour des œdèmes et le flux énergétique.

Dans une rencontre avec l’agence TAP, la championne titulaire de la seconde place en Suisse en 2023, le 10ème rang au championnat de Nice en 2022, évoque ses débuts, son parcours, mais aussi ses rêves dans un domaine désormais classé également parmi les expressions artistiques humaine en tant qu’Art qui touche le plus sensible de l’être humain : l’âme avec tous ses sens et émotions. La massothérapie est comme la musicothérapie…touche l’âme pour soulager le corps.

Depuis l’âge de 8 ans, elle avait le don de masser. Après chaque séance d’entrainement, se souvient-t-elle, son frère, le lutteur Mohamed Kamel Bouaziz courrait vers elle en répétant à chaque fois à sa mère « Elle a quelque chose de magique dans ses doigts, elle me soulage ».

Chose qu’elle n’en prit conscience qu’après de longues années, par pur hasard. Préparatrice en pharmacie à la base, elle fut repérée par une massothérapeute roumaine Anna Kouka. Depuis, « toute ma carrière a changé. De la toute première formation qu’elle m’a proposée, je me suis trouvée de jour en jour et au bout de 27 ans, dans des univers pluriels que je découvrais et dans lesquels je me découvrais aussi », se remémore- t-elle avec émotion.

Cette passion l’a amené au fil des années à effectuer des stages et des formations en massothérapie manuelle à visées esthétique et anti-douleur par des spécialistes chevronnés notamment du Centre international de médecine alternative et complémentaire d’Egypte WACAM, de l’Académie AFT- Californie (énergie et physique quantique), du World Massage Council (WMC).

D’emblée, ses différentes participations aux séminaires et congrès à l’étranger (France, Italie, Maroc, Egypte, Suisse) lui ont valu, plus de 45 diplômes et certificats de formation embrassant plus d’une spécialité : les thérapies manuelles (massothérapie, etc.), l’approche corps-esprit (méditation, énergie quantique, reiki.), les systèmes complets (acupuncture, réflexologie plantaire…) et les thérapies biologiques (pression d’huile à froid dans l’aromathérapie).

Abordant le patient comme un être dans sa globalité et dans ses différentes dimensions physiques, sensorielles, émotionnelles, mentale et spirituelles, elle s’est formée en podologie médicale et podologie de sport, en drainage lymphatique, en yesothérapie/plâtre, massage aux

cupping therapy, …autant de techniques qu’elle a exploré à partir d’un fort désir de mettre ses connaissances, son savoir-faire et son expérience pour répondre aux besoins du patient en quête de vibrations curatives. Dans ce domaine en perpétuelle évolution où plus de 400 pratiques thérapeutiques sont recensées jusqu’à ce jour par l’OMS dans la famille des médecines dites «  alternatives », «  complémentaires  ou « traditionnelles », elle a décidé de magnifier et de perfectionner les méthodes et techniques portant ainsi plus d’une casquette dans un domaine qui est pour elle une passion, un art. « La massothérapie c’est comme la musicothérapie, elle a sa propre musicalité, si je ne touche pas l’âme, je ne pourrai pas soulager le corps », dit-elle. S’ouvrir sur les nouvelles spécialités d’ailleurs où de surprenantes disciplines sont en train d’émerger.

Cherchant à enrichir ses connaissances pour être à jour dans toutes les avancées dans ce grand univers où de surprenantes disciplines sont en train d’émerger en aval et en amont (comme par exemple la massographie imaginée en 2006 par le maître-masseur Florent Deles, inscrit au tableau de l’Ordre des masseurs de l’Yonne, spécialité massages artistiques symphonique et rythmique), elle vient de se former avant de s’envoler en Suisse, en deux nouvelles techniques, le massage de tissus profonds, idéal pour les sportifs et le Tox Sen Therapy, technique ancestrale pratiquée à l’aide d’instruments en bois et considérée actuellement comme un traitement puissant anti-douleur. Cette quête, dit-elle, « me ramène de plus en plus vers de nouvelles approches dans ce monde magique et qui ne font qu’alimenter de plus en plus mon ambition de créer un jour une école ou un centre ou une académie de formation pour les massothérapeutes qui soit reconnue et réglementée en Tunisie et qui permettra de s’ouvrir sur ce secteur dont la présence est importante dans le système de santé.

La massothérapie est un métier qui demande de la passion et beaucoup de connaissances, de formation continue et de dévouement.  « C’est pourquoi il est nécessaire qu’un centre de formation de qualité doté de formateurs qualifiés, de spécialistes des thérapies holistique et sportive, puisse exister un jour en Tunisie.

Lancer dans le pays un centre de formation ou une académie comme l’IMAS en Suisse, qui a la réputation d’être le « formateur des formateurs » dans le monde entier, permettra tout d’abord de reconnaitre ce métier, de le réglementer selon un code d’éthique et de favoriser dans le sillage la création de nouvelles perspectives de formation et d’emploi pour des jeunes qui ne pensent malheureusement qu’à d’autres alternatives irréfléchies. Plus encore, un tel centre, a-t-elle expliqué, pourrait faire de notre pays une référence arabe, maghrébine ou africaine sachant par exemple que plusieurs initiatives sont lancées comme c’est le cas au Cameroun, pour en faire de ce pays une destination prisée en matière de formation dans les métiers de massothérapie, pratique de soin millénaire, universelle dépositaire d’une incroyable richesse technique, culturelle et spirituelle ».

Le championnat de Tokyo 2023 et le Mondial de WMC seraient-ils possibles ?

Soutenue dans son parcours par son époux qui a cru en elle, en ses mains de fée et de bienfaits, Hella Bouaziz a pu faire sauter tous les verrous, dépasser toutes les difficultés notamment financières, pour aller au-delà des frontières se former, participer aux stages et à deux championnats où elle a côtoyé des thérapeutes holistiques de renom et des praticiens reconnus notamment en France, en Italie et en Suisse. Au cours de sa participation au championnat de Suisse, – dont les échos ont été largement médiatisés notamment par la Télévision suisse que par la presse internationale-, Hella Bouaziz qui a suscité l’admiration d’un beau monde de professionnels a pu rafler une belle place aux côtés de massothérapeutes reconnus dans leurs pays pour ne citer que l’indienne Anamika Barman (médaille de bronze et d’argent dans deux catégories), qui travaille actuellement comme massothérapeute sportive au NCOE (Centre national d’excellence) à la Sports Authority of India à Guwahati, ayant supervisé des athlètes indiens connus comme Lovlina Borgohain, Hima Das, Ankushita Boro et Jamuna Boro.

La «  gladiatrice tunisienne de la massothérapie », telle que l’a qualifié Stephanie Tonmi, membre de jury, continue à explorer d’autres pratiques avant de se préparer pour de prochaines compétitions, guidée par la volonté de décrocher un jour la première place parmi des candidats en provenance de pays où la culture du massage est très développée.

Son défi est de bien se préparer pour pouvoir prendre part au championnat de Tokyo (octobre 2023) et au championnat mondial WMC 2024 (World Massage Championship) approuvé par le WMC et organisé par l’IMAS les 25-26 mai 2024 à Fribourg (Suisse), avec pour ambition «  faire réentendre l’Hymne national comme en 2023 en portant très haut le drapeau de la Tunisie pour être, de là où je suis, une de mes grandes fiertés», conclut-elle avec une note d’espoir.

Sarra Belguith

 

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