Festival de Hammamet : Jamel Madani dans «Prometheus, the blue kangaroo»
Sans déroger à la tradition, le public de Hammamet est habitué à assister à l’ouverture de son Festival international par une pièce théâtrale. Sa 57e édition, est placée sous le thème « Colorons le Monde ». Le théâtre est en effet au cœur de ce rendez-vous annuel. Hammamet a choisi la pièce «Prometheus, The blue kangaroo», après son avant-première aux Journées théâtrales de Carthage (JTC) 2022, du metteur en scène Palermitain Simone Mannino. Il s’agit d’une coproduction Tuniso-italienne. Les dialogues sont en italien, arabe et un sous-titrés en français.
Simone Mannino a réuni des comédiens tunisiens et italiens de la trempe de Jamel Madani (Prométhée), Aymen Mabrouk, Mariem Sayeh, Giorgio Coppone, Paolo Mannina et Chiara Muscato. L’équipe technique est italienne sauf le talentueux éclairagiste tunisien, Sabri Atrous.
Dans « Prometheus The Blue kangaroo », Simone Mannino propose une adaptation théâtrale inspirée de la tragédie d’Eschyle dont il a écrit avec l’écrivain Lorenzo Marsili. Une mise en scène contemporaine, esthétique et philosophique qui interpellent un public averti.
L’intensité et la splendeur de l’aspect tragique toujours présent dans la mythologie grecque a été exceptionnellement mise en avant à travers une belle musique du compositeur et pianiste Gaetano Dragotta.
La conception graphique, le choix des costumes où la couleur bleue domine, la musique et tous les aspects techniques de l’œuvre ont marqué les jeunes et moins jeunes. Simone Mannino, à travers ce registre classique avait porté le public à une réflexion autour de cette tragédie grecque aux allures modernes. Une inspiration d’Eschyle, un regard sur la vie, la dualité de la naissance et de la mort. Au-delà du mythe, une fusion de questionnements sur une nouvelle esthétique dramatique pour dénoncer les politiques actuelles, bien loin de la surpuissance des Dieux et des héros de la mythologie. On suit la déchéance de Prométhée, qui retrouve ses valeurs humaines, qui dans la mer infinie et dans les flots immaculés, il se purifie de la barbarie.
En transposant la dramaturgie antique, le tableau de notre monde actuel se dresse avec ses problèmes liés à l’environnement et au cynisme du genre humain. Le comédien Jamel Madani avait affirmé lors de la conférence de presse tenue après la présentation de la pièce, que celle-ci avait constitué une nouvelle expérience qui lui a demandé beaucoup d’énergies. En effet beaucoup d’efforts ont été réalisés pour réussir une adaptation futuriste de la tragédie d’Eschyle, notamment pour mémoriser le texte italien. Il avait affirmé que c’était un défi pour lui. Un défi à la fois ardu et exaltant.
L’artiste avait également déploré l’absence des politiciens tunisiens lors de la représentation sur scène, alors que l’ambassadeur d’Italie en Tunisie, son staff et le directeur du centre culturel italien étaient tous présents. En dépit, de la canicule du 8 juillet dernier, le Théâtre de plein air de Hammamet n’était pas aussi rempli. Une ouverture d’une telle envergure valait pourtant bien le détour. Ce spectacle avait malgré tout permis une communion entre les peuples pour un monde sans frontières consolidant ainsi la fraternité qui est en train de perdre dans une époque de plus en plus inhumaine.
Sayida Bourguiba
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