Bouraoui Regaya «La vie ce n’est pas seulement respirer, c’est avoir le souffle coupé »

Pour lui, le voyage est la seule chose qui s’achète et vous rend plus riche. Il est avant tout ingénieur en chimie physique, professeur universitaire, rugbyman passionné, un conférencier hors pair et même musicien luthiste. Mais il est surtout l’Ulysse des temps modernes et pour lui, « tous ceux qui errent ne sont pas perdus ». Lui, c’est Bouraoui Regaya, un infatigable voyageur. Ses différents ouvrages nous plongent dans des lieux parfois insolites qui regorgent d’anecdotes. Il aurait dit les mêmes choses qu’Ibn Battuta que « voyager vous laisse sans voix, avant de vous transformer en conteur. »

Il s’est découvert une passion pour les voyages depuis tout petit. Peu à peu, c’était devenu une obsession. Dès qu’il avait la moindre journée de libre, il partait et « il adorait l’anonymat dans une ville où il n’est jamais allé auparavant ». A l’étranger, il se sentait dans son élément et quand il voit une colline, il veut découvrir ce qu’il y a derrière.  Il ne cherche pas à penser pour les gens, il leur montre tout simplement les choses… « Un bon voyageur n’a ni plans établis ni destination… ». Nous avons rencontré ce voyageur inouï, frisant la légende portant tous les jours une nouvelle chemise du monde. C’est qu’il en possède 365. Entretien.

Si vous aviez à vous définir, vous diriez quoi ?

Un amoureux de mon pays, de son patrimoine en général et en particulier de sa musique.

Comment avez-vous attrapé cet inguérissable virus du voyageur ?

Le virus je crois l’avoir eu dans ma ville à Ksar Hellal d’où mon prénom de Bouraoui.  Mon père travaillait à la gare. Dans le ventre de ma mère,   j’ai déjà voyagé à Sousse, Tébourba, Jedaida, Borj Toumi, Mateur, Tindja, Menzel Bourguiba ( Ferryville à l’époque) et Bizerte. Mon grand ami feu le professeur Sleim Ammar qui m’a écrit un beau poème sur les voyages (Regaya Bouraoui, voyageur inouï), avait relevé que ce virus a été attrapé par les sifflets de mon père ancien chef de gare et par les bruits des trains.

Pendant les vacances d’été, une vingtaine de camarades de promotion ont décidé de partir en voyage en Scandinavie et ont tout fait pour que je parte avec eux alors que je n’avais aucun sou. Le chef de groupe est venu me voir pour me dire que même si je n’avais pas d’argent, eux non plus n’en avaient pas. Mais il y avait une démarche à suivre…

Le lendemain, chacun avec son sac à dos, nous nous dirigeons vers la sortie de la ville et nous commençons à faire de l’auto- stop. Pour la plupart, sortie de notre promotion d’ingénieurs de l’Ecole de Bordeaux (juin 69) nous nous retrouvons tous les dix en Suisse première étape de notre périple. A l’époque l’auto- stop était un moyen très courant, pour voyager.  Un véhicule avec des places disponibles s’arrêtait toujours pour prendre des passagers. Il n’y avait ni banditisme ni terrorisme.

Nous nous retrouvons tous à la gare de Genève. Notre chef de groupe qui a tout programmé s’arrête devant l’auberge prévu et discute les modalités de notre séjour.  On s’occupera désormais de la cuisine, des chambres et de la propreté des lieux. Nous avons reçu une petite somme d’argent en tant qu’avance et avant notre départ, le reste nous sera donné.

Vous croyez que nos jeunes aujourd’hui auront cette idée pour pouvoir voyager ?

J’attire justement l’attention de nos jeunes, que ce mode de payement existe encore actuellement.  Pendant les vacances, les hôtels et les auberges manquent de personnel à l’étranger.

Qu’avez-vous fait après votre départ de l’auberge ?

Nous avons continué notre périple en Allemagne, au Luxembourg, en Belgique, en Hollande, au Danemark, en Suède et en Norvège toujours avec le même principe. Le périple s’est arrêté dans la ville des lumières à Paris où nous avions passé quelques jours avec l’argent gagné de notre labeur. C’était mon premier voyage en groupe qui m’a beaucoup appris. J’avais acquis un esprit de groupe, les découvertes fantastiques, la diversité, les us et coutumes, mais ce qu’on apprend par-dessus tout dans ce voyage, à part les avions, les bus, les trains, on peut voyager sans dépenser un seul millime et cerise sur le gâteau, revenir au pays avec de l’argent plein les poches.  Bien évidemment, ce mode de voyage peut être fait jusqu’à un certain âge.

Vous avez ensuite revu ce groupe d’amis voyageurs ?

Quelques années plus tard, j’ai invité chez moi le restant du groupe (plus âgés et mariés) et nous avons visité toute la Tunisie.  Nous avons pu apprécier notre mode de vie, nos monuments historiques, la Médina de Tunis, les plages, les différentes cérémonies de mariages les festivals de musique et surtout notre merveilleux Sahara.

Combien de pays avez-vous déjà visité, ou est-ce plus facile de nous mentionner lesquels encore non visités ?

C’est une question qui m’a été posée plusieurs fois. On croit toujours que seuls les 198 membres de l’O.N.U sont des pays. En fait dans le club des grands voyageurs, les pays sont 242. Les principautés comme Monaco, Lichtenstein (entre la Suisse et l’Autriche), San Marino (près de Bologne en Italie) et plusieurs iles au Pacifique comme les îles de Pâques et de Féroé (Angleterre), ont une histoire propre, des Timbres et des monnaies propres sont considérés comme étant des pays. Actuellement, j’ai visité deux cent dix pays. En Afrique, il me reste encore Sao Tomé et Principe (problème de visa). En ce concerne les iles du pacifique, l’avion passe une fois par mois, c’est un peu long, j’aurai pu proposer à notre champion olympique Ossama Mellouli, de faire ces iles à la nage ! (Rires).

Quelles sont les anecdotes les plus marquantes dans vos différents voyages ?

Les anecdotes de voyages il y en a eu tellement… Je vais essayer de choisir les plus belles. J’ai sillonné l’Afrique dans tous les sens. On s’habitue aux retards d’avions d’où quelques surnoms de certaines compagnies, Air Afrique,  « Air peut-être », Ghana Airways «  Inchallah.

Aux Iles Samoa (pas loin de Tahiti),  à l’enregistrement en avion, on pèse les passagers et non les bagages. (il faut dire une personne moyenne pèse 140 Kg), l’avion part toujours avec des sièges vides !

Un autre moment insolite, a été le déraillement du train à Tambacounda au Sénégal pas loin de la frontière du Mali. On était descendu pour voir ce qui se passe.  Le contrôleur nous rassure,  rien de grave et  on repartira dans une heure.  En fait on est reparti après 48h. Un Africain disait : « Nous n’avons aucune notion du temps. Vous les blancs, vous avez deux montres mais n’avez jamais le temps !»

Au Pérou, le chauffeur du train nous a laissé en pleine campagne pour disparaitre un moment.  Intrigués, nous demandons à un passager ce qui se passait.  Sans inquiétude, il nous répond que le chauffeur du train lui arrive souvent de s’arrêter. Il n’habite pas très loin et en profite pour aller voir sa famille, manger, se doucher et revenir pour nous conduire à la prochaine gare ! Heureusement qu’il n’a pas pris sa sieste !

Et votre plus grande peur ?

Ma plus grande peur, c’était à la frontière Argentine- Uruguay dans le bus desservant la ligne Buenos Aires-Montevidéo. Nous quittons la gare routière à 10h et nous arrivons à la frontière à 14h. Tous les passagers descendent pour les contrôles policier et douanier. Un contrôle long et fatiguant. L’Argentine sous le gouvernement militaire du général Vedela. Après de longues heures, le chef de police remet les passeports à tous les passagers sauf le mien. Il me demande de descendre mes bagages du bus et de le suivre au poste. Avec forte angoisse, je vois le bus repartir sans moi. Au commissariat, me voilà l’objet d’un interrogatoire sans répit en mi- espagnol mi- français. Il me questionne sur le but de mon périple à travers toute l’Amérique du Sud et surtout sur ma visite en Argentine. J’ai beau expliquer que le désir de connaître le pays a été le seul but du voyageur passionné que je suis. Rien n’y fit !

Après avoir feuilleté mon passeport, le chef de police est tout à fait convaincu du contraire. C’est que quelques mois plus tôt, j’avais eu la malencontreuse idée de faire toute l’Europ de l’Est ! Je représentais le personnage parfait de l’agent double ! En plus avec ma barbe de plus d’un mois, je ne devais pas avoir une tête qui inspire particulièrement confiance. Mes bagages sont passés au peigne fin.

Après des heures d’interrogatoire, le chef m’informe qu’il est obligé d’attendre le commissaire du centre pour prendre la décision qui s’impose à savoir me laisser partir ou me ramener à la direction générale de la police des frontières à Buenos Aires. A ce moment précis, je réalise le sérieux de la situation. Je me vois déjà jeté au fond d’une cellule noire ou carrément exécuté sans aucune forme de procès. Je comprends alors qu’à vouloir conquérir coûte que coûte le monde, je me suis mis dans de beaux draps.  Je serais jeté avec du haut d’un avion dans le vide comme c’est l’habitude. Le comble, c’est que ma famille ne savait même pas dans quel coin du globe je me trouvais et nous n’avions même pas une représentation diplomatique tunisienne en Argentine.

Je suis jeté dans une cellule et seul je commence à réciter la « Fatiha » car je me voyais disparaitre. Une heure plus tard, arrive le commissaire central. Malgré sa carrure impressionnante, il dégageait une bonhomie qui me redonne confiance. Après avoir lu le rapport, il s’enquiert de ma profession.

« Je suis professeur universitaire et je m’occupe de rugby en Tunisie ». A l’évocation de cette discipline, son visage s’illumine.  Sans réfléchir, il déchire le rapport en s’excusant du désagrément causé par ses agents. « Ô ballon ovale, je suis déjà ton fervent adepte, le voici aujourd’hui mon sauveur… ». Pour se faire pardonner, le commissaire m’invite à déjeuner. Au  cours du repas, il m’apprend qu’il a lui-même été joueur de l’équipe nationale de rugby d’Argentine. Il m’accompagnera ensuite jusqu’à la frontière de l’Uruguay. De là, je prends enfin le bus pour Monevideo.

Comme quoi, les voyages peuvent être parfois dangereux ?

Si vous pensez que les voyages ou l’aventure sont dangereux, essayer la routine…

Pourquoi cette passion du voyage et cet attrait pour l’ailleurs et l’autre ?

L’ailleurs, c’est l’inconnu qu’il faut aller découvrir, aller vers l’autre et apprendre ce dont nous ne sommes pas habitués.  C’est comme à l’école, tu rentres en classe, le professeur donne une nouvelle leçon et quel que soit la matière, on en ressort enrichi. La Fontaine disait : » « Quiconque a beaucoup vu, peut avoir beaucoup retenu » et « Le voyage se mesure mieux en amis qu’en miles ».

Après tous ces voyages, votre vision de la vie a-t-elle changée ?

Quand on ne quitte pas l’endroit où l’on vit, on tombe dans la routine à laquelle on s’y accoutume très facilement. Le contact avec les autres, la richesse de leur patrimoine en partageant le nôtre, en parlant de notre pays, de notre culture, en s’échangeant des cadeaux, nous enrichissons notre mémoire et nous acceptions mieux les différences. Marcel Proust disait que le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais surtout de nouveaux yeux ».   et puis « la vie n’est pas simplement respirer, c’est avoir le souffle coupé ».

Je suis certain que dans le monde actuel, par l’intermédiaire des organismes internationaux comme l’U.N.E.S.C.O,  on peut imposer dans les institutions éducatives des programmes pédagogiques pour que les jeunes voyagent et se connaissent mutuellement. A travers les clubs services tels les Scouts partout dans le monde, les jeunes se connaitraient mieux et cela peut contribuer à une paix dans le monde.

Vous avez dit un jour que « tous nos problème proviennent de l’ignorance ». Peut-on en savoir plus ?

La plupart des problèmes que nous vivons dans notre société sont à 99% crées artificiellement par l’égoïsme, l’ignorance, le manque de sang-froid et de  raison. N’importe quel problème a une solution, il est résolu pratiquement par la sagesse et l’intelligence.

Les vrais amis aident aussi à trouver des solutions. Un proverbe chinois affirme que « Si vous avez un problème asseyez-vous et attendez que ça passe  ». Quant à Coluche, il disait que «  si vous avez un problème et que vous ne vous sentez pas bien,  faites-vous sentir par un autre ! »

Quelle serait la femme idéale pour vous ?

La femme idéale doit être vive d’esprit, sociable, dynamique laisser son homme libre si elle veut le garder, Avoir beaucoup de sang froid. Etre complice avec son compagnon et avec sa belle-famille, avoir de l’humilité, donner une bonne éducation aux enfants et avoir de bons amis.

Qu’appréciez-vous chez les bons amis ?

Dans l’entourage d’un couple, les vrais amis sont la joie de vivre, ils constituent la grande famille pour organiser des soirées musicales à la maison, voyager en Tunisie et à l’étranger. Ils doivent aussi être présents dans les moments difficiles. Pierre Perret a dit : « les amis c’est comme les melons, il faut tâter cent pour en trouver un de bon ».

Parlez-nous un peu de votre vision du mariage limitant un peu cette indépendance et de votre épouse, la belle avocate Djerbienne ?

Chercher la femme ou l’homme de sa vie est plus facile actuellement. La mixité est partout, dans l’école, dans le travail, dans la rue… choisir sa moitié est une chose sérieuse. Pour moi elle doit être éduquée, aimant la vie, bel esprit, sincère, solidaire, humilité, pas jalouse, souriante… Pour moi, ce sont des fondamentaux importants dans une vie de couple équilibrée et saine. Je me suis marié à 38 ans.  J’ai rencontré la femme de ma vie, Zeineb Ben Youssef. Comme tout mariage on passe par une période de rodage sans trop de problèmes avec de beaux voyages tels Los Angeles, les Caraibes, Cuba, la Jamaique le pays de Bob Marley et Hussein Bolt.

 Est-ce vrai que le jour de votre mariage, vous étiez en voyage et que vous avez angoissé la famille qui recevait les premiers invités ?

Avant le mariage, j’avais décidé de partir très loin, en Inde plus précisément dans le pays des Mahradjas, le Népal (le toit du monde l’Hymalaya). J’ai voulu finir ma vie de célibataire dans le pays de la raison, de la sagesse, voir le Taj Mahal, la Mère Théresa et son église à Calcutta, à Bénarès la Mecque des Indous, le Gange cette rivière sacrée sur les rives lesquelles se montent les bûchers pour bruler leurs morts. Ce voyage plein de merveilles, de traditions, de sensations,  m’a permis de laisser une vie pour mieux me préparer à une autre pleine de sagesse et de maturité.

Sur le chemin du retour, j’ai fait un détour par l’Allemagne et plus précisément par Stuttgart retirer la Mercedes (cadeau de mariage pour la mariée). Comme j’avais un peu de temps je suis rentré par la France, l’Espagne, le Maroc, l’Algérie et enfin la Tunisie quelque temps avant le mariage mais quel périple !

Pendant mon absence plusieurs mauvaises langues se sont déliées pour faire monter les enchères. On avait dit à ma future épouse Zeineb « apparemment tu ne connais pas assez bien Bouraoui. Tu ne crois  pas qu’il va oublier la date de ton mariage ?  Il ira sans doute vers Bankok ou au Vietnam ? Sa réponse a toujours été la même : « Bouraoui m’aime à la folie. Je sais pertinemment que  j’ai affaire à un authentique original. ».

Ce mariage a finalement eut lieu. Tout s’est bien passé et comme Zeineb ne connait ni Djerba ni le Sud ni le  Sahara, nous avons réalisé une lune de miel fantastique de dix jours sans quitter le pays. Puis un premier voyage à deux pour rejoindre notre équipe nationale de rugby qui participait aux jeux méditerranéens à Split en Croatie (ancienne Yougoslavie)

Une anecdote avec votre épouse ?

J’ai failli être agressé par trois grosses femmes.  J’étais accompagné par Zeineb et on se baladait dans le souk des souvenirs.  Un peu fatiguée, elle a demandé une chaise à une vendeuse pour se reposer dans sa boutique.  J’ai continué à vadrouiller pour revenir ensuite la chercher. C’est alors que je vois trois femmes de 100 kg chacune avec un gros bâton prêtes à m’agresser en me disant «  Vous n’avez pas honte de laisser votre femme aussi chétive? Vous  si gros, vous  la privez de nourriture… Bien évidemment Zeineb leur avait plaisanté auparavant et elles l’avaient cru, et ont voulu m’abbattre!

Avec tous ces voyages, vous avez eu le temps d’avoir des enfants ? (rires)

Nous avions eu trois enfants. Thouraya, avocate mariée à Mehdi Torki. Ils m’ont rendu grand père avec deux enfants Alya et Mohamed Amine.

Bechir marié à Faten Ben Chehida professeur agrégée vétérinaire qui ont eu aussi deux enfants, Selim et Aziz. (Ce dernier, qui parait-il me ressemble comme deux gouttes d’eau).   Moez marié avec Ghada Chakroun tous deux architectes. Ils  ont eu Lilia et Hedi. Voici ma belle tribu et leur présence contribue au ciment de notre vie.

Quel serait le métier que vous n’auriez jamais pu faire ?

Sans hésiter, la politique ! Juste après mon retour définitif de France avec mon diplôme de Docteur-Ingénieur, des propositions de hauts postes dans la politique, m’ont été faites. Je n’ai jamais été tenté et ma réponse a été toujours négative. Je veux rester un homme libre et Dieu merci, la musique, le sport, le don de soi et les voyages ont pris une place primordiale dans ma vie.

Vos artistes préférés

Depuis le lycée Khaznadar, avec nos professeurs feus Si Mohamed Annabi (spécialiste de piano et de musique classique) et Si Taoufik Dhouioui, professeur au fameux conservatoire de la Rachidia, j’ai appris que la musique est essentielle. En plus des leçons, un club de musique est créé où nous apprenons les chansons et les « mouachahats ». Aujourd’hui, je suis fier d’être le vice-président de l’Association des fans de l’artistes Mohamed Abdelwahab. Après le baccalauréat et juste avant mon départ à Toulouse j’ai acheté un luth pour continuer à me perfectionner. Par conséquent, depuis mon jeune âge, grâce à la rencontre avec ces imminents professeurs, j’avais une bonne culture musicale que j’ai continué l’enrichir au fur à mesure de mon séjour pendant mes études supérieures.

Bien sûr, j’adore notre patrimoine musical tunisien et oriental, j’aime la musique classique occidentale avec ses symphonies et ses variétés. J’avais passé trois journées mémorables à la Nouvelle Orléans (La Louisianne) capitale du jazz mondial mais avec mes déplacements en Afrique j’ai toujours eu un faible pour la musique africaine et ses rythmes endiablés.

Quel est votre meilleur jour de la semaine ?

Tous les jours sont merveilleux lorsqu’on est à la retraite, c’est la vraie vie ! On se réveille quand on veut, c’est la vraie liberté. Certains esprits qui n’ont rien compris à la vie disent que la retraite c’est un pied dans la tombe. Ces gens-là, je crois, depuis leur naissance ont déjà les deux pieds dans la tombe !

A la retraite, on est plus décontractés et on peut consacrer plus de temps à autrui, au travail caritatif, aux personnes qui ont besoin d’aide, aux déshérités dans les campagnes et ils sont nombreux.

Quelles sont vos occupations aujourd’hui ?

Le dimanche je m’occupe des compétions de sport et plus spécialement le rugby. Le sport est une école de vie. L’après-midi est consacré à la musique.  Après la retraite toutes les journées sont bonnes pour faire des choses intéressantes. Il suffit de bien les programmer. Depuis ma retraite (déjà 24 ans) je ne trouve pas assez de temps pour m’occuper de choses que je dois faire. Avec tous les clubs auxquels j’appartiens… Actuellement je suis très sollicité par les medias tunisiens, étrangers et les conférences…

Quels sont vos héros et les évènements marquants votre vie?

Sans hésiter, Mahatma Ghandi, le père de la sagesse, Nelson Mandela, Louis Pasteur, Ibn Sina, Ibn Khaldoun et Einstein. En ce qui concerne les évènements, je n’oublierais jamais les premiers pas de l’humanité sur la lune.

Votre dernier livre de chevet ?

Dans la vie on a besoin de se détendre, de rire, de s’éloigner du monde réel où souvent rien ne va et où les guerres envahissent le monde… Heureusement qu’il y a des jeux Olympiques tous les quatre ans, les festivals de musiques… Mes livres de chevet sont des livres d’histoires drôles. Mais si jamais j’ai un conseil à donner aux lecteurs et amis assis dans leur fauteuil, je leur dirais de regarder les chaines de télévisions d’animaux et surtout « Ushuai », « Un train pas comme les autres » ou « Echappées belles ».

 Vos différents voyages et les souvenirs ramenés, peuvent permettre aujourd’hui des expositions ?

Oui, des expositions de timbres, de monnaies, d’œuvres d’art… J’ai déjà exposé la première fois à Carthage dans l’espace Sophonisbe chez feue Jalila Hafsia. Cette grande dame qui a beaucoup fait pour la culture tunisienne. J’ai aussi exposé en Italie et en Algérie aux Universités de Annaba. J’ai exposé également au centre international du livre à la porte de Versailles à Paris.  Bien évidemment dans notre pays aussi dans pratiquement tous les centres culturels, plusieurs Universités, des lycées, des écoles et dans les foyers universitaires.

Ya aussi un club qui porte votre nom…

Dernièrement, mes enfants avec leurs cousins et leurs amis ont créé en effet un nouveau club intitulé « On a voyagé avec Bouraoui ». On se réunit tous les mois pour discuter de voyages.  Ce qui intéressant, chaque fois qu’un membre revient de voyage,  on fait la projection du film de ces différents voyage et on discute en vidéo vision avec des membres à l’étranger.

Les voyages vous ont aussi transformé en un véritable écrivain…

Dans toute ma carrière, j’ai écrit douze livres sur mes pérégrinations, le dernier en date, une autobiographie intitulée « Holm, Hayet », « Une vie, un rêve ». Ce sont mes amis qui m’ont poussé à l’écrire.

 Quel est votre meilleur souvenir ?

C’est incontestablement mon mariage.  Cela marque pour toute une vie surtout avec le succès des enfants dans leurs études, leurs vies professionnelles et leurs mariages

Quel est le pays où vous aimeriez vivre ?

Certainement dans ma belle Tunisie, pays de mes ancêtres, de notre histoire, de plusieurs civilisations : les Puniques, les Berbères, les Byzantins, les Romains, les Arabes avec l’Islam. 1200 km de côte, de belles plages, de magnifiques îles avec leurs histoires Djerba, Kerkenna, Jalta, un grand Sahara, des montagnes à Ain Drahem, Chaambi à Kasserine, Zaghouan, Oueslatia, Boukarnine et bien d’autres. Mais le point fort de notre pays, c’est qu’il  est rempli de sources thermales, Korbous, Djebel El Ouast, Zriba, Bent Jedidi toutes à quelques km de Tunis, Ain Drahem, Hammam Bourguiba, les deux hammams d’el Hamma de Gabés,   de Tozeur et surtout Ksar Ghilane A 100 Km de Douz en plein Sahara avec l’eau chaude en surface. C’est dommage que plusieurs de nos compatriotes ne connaissent pas bien notre pays un vrai trésor !

Vous avez une  vie sportive également…

Parallèlement à cette vie d’enseignement j’ai commencé effectivement plusieurs activités sportives, culturelles et caritatives. Ayant joué au Rugby (la première fois que je voyais un ballon rond, c’était à Toulouse). Tahar Belkhodja (lui-même ancien rugbyman à l’école d’agriculture et ministre de la jeunesse et sports) m’avait convoqué pour créer la première fédération tunisienne de rugby (F.T.R) avec feu Slaheddine Baly  président, moi-même Secretaire Général et des membres feux B.S Belkhiria, H. Belhaj, H. Ouahchi, M. Boulakbeche, H. Harrouche, R. Chelly et des membres français. En moins de dix ans notre Equipe nationale jouait avec la poule A de la F.I.R.A, la France, l’U.R.S.S,  la Roumanie, l’Italie et l’Espagne.

En 2013/2014 devenu gouverneur de notre district Lions 414 Tunisie, J’ai créé avec le professeur Abderrazak Hihi, un club de musique. Avec d’autres amis un club du rire lancé depuis une trentaine d’années et qui existe toujours. On se retrouve à la maison où chacun raconte les dernières histoires drôles. Nous passons à chaque fois des moments très agréables car « un homme qui ne rit plus est un homme mort ». Je suis également membre des scouts tunisiens et par la même je lance un appel aux parents pour inscrire leurs enfants dans les scouts qui font beaucoup d’excursions en Tunisie et même des voyages à l’étranger.

Avez-vous peur de la mort ?

Je crois qu’un homme intelligent ne doit pas avoir peur de la mort qui fait partie de la vie. « La vie est une maladie mortelle, sexuellement transmise… ». Tout être vivant doit accepter cette fin inévitable. On ne peut que prier Dieu pour qu’elle soit tardive et mourir en bonne santé.

Quelle serait la phrase que vous diriez à Dieu après un long et dernier voyage vers les cieux ?

Mon Dieu ! Je lui dirais que je le remercie pour le monde si extraordinaire et merveilleux offert aux humains. Mon Dieu, je vous remercie de cette magnifique vie où j’ai essayé d’être près des démunis, les aider à supporter les difficultés. Mon Dieu, j’espère que mon chemin de vie a été le plus droit possible. Je vous demande pardon pour les fautes que j’ai pu commettre.

Entretien conduit par Nadia Ayadi

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