Lycée sportif d’El Menzah : Le cri de détresse d’une surveillante principale

 

Il fut un temps où l’Institut sportif « Pierre de Coubertin » d’El Menzah incarnait la fierté nationale. Né de la vision éclairée d’hommes patriotes et d’experts passionnés, ce lycée sportif unique en son genre avait pour mission noble de concilier études et sport de haut niveau. Adossé à la Cité nationale sportive d’El Menzah, il symbolisait une Tunisie ambitieuse, consciente que l’intelligence et la performance physique pouvaient s’unir dans une même quête d’excellence.

Ce lieu d’exception n’était pas accessible à tous. Seuls les élèves méritants, choisis pour leur potentiel et leur discipline, franchissaient ses portes,  sans piston ni favoritisme, mais sous le sceau du mérite et du respect. Encadré par les ministères de la Jeunesse, du Sport et de l’Éducation, cet institut formait des générations de champions et de citoyens accomplis.

En 2013, la consécration internationale est venue couronner cet engagement : le Prix Mohamed Ben Rached Al Maktoum de la Création Sportive a salué le rôle exceptionnel du lycée dans la formation de sportifs performants et de bacheliers brillants. Parmi ses anciens élèves, des noms qui résonnent comme des fiertés tunisiennes : Ons Jabeur, Ayoub Hafnaoui, Sofiane Labidi, et tant d’autres qui ont porté haut les couleurs du pays sur les podiums du monde. Mais aujourd’hui, le joyau vacille. Ce qui fut un temple du mérite et de la discipline glisse lentement vers la décadence, miné par la négligence, la complaisance et le laxisme. Le recrutement ne répond plus aux critères de rigueur d’antan. Les élèves admis ne poursuivent pas toujours un objectif de haut niveau. L’organisation se délite. Les valeurs fondatrices s’effritent.

Face à cette dérive, Rym Mouelhi, surveillante principale et mémoire vivante de l’établissement, lance un cri de détresse. Son alerte, empreinte d’amour et de patriotisme, dénonce une situation alarmante : « des absences répétées sans contrôle, des notes catastrophiques, des stages sportifs négligés par les élèves sans raison, des comportements déviants non sanctionnés, un manque flagrant d’encadrement et de discipline.
Les infrastructures se dégradent, la propreté se perd, la sécurité n’est plus assurée. En effet, quatre entrées ouvertes sans gardiens, un danger permanent pour les élèves. Certains en profitent pour fumer ou s’adonner à des substances illicites. Le personnel de surveillance, souvent recruté par complaisance, manque de conscience professionnelle. Pendant ce temps, les autorités restent sourdes à l’appel au secours. Les rapports, les lettres, les demandes restent sans suite. »


Rym Mouelhi, témoin de cette lente agonie, continue de se battre, seule ou presque, pour sauver ce symbole du mérite tunisien. Elle refuse de voir s’éteindre la flamme qui a illuminé tant de destins, celle qui a fait naître des champions et des citoyens d’élite. Aujourd’hui, il ne s’agit plus seulement de sauver un lycée. Il s’agit de sauver une idée de la Tunisie, celle de l’effort, de la discipline et de la grandeur.
L’Institut « Pierre de Coubertin » d’El Menzah n’est pas un simple établissement : c’est un patrimoine national, un héritage moral que nous devons défendre. Que ce cri de détresse soit entendu.  Car quand un lieu d’excellence meurt dans l’indifférence, c’est la conscience d’un pays tout entier qui vacille.

Nadia Ayadi

 

 

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